19 avril 2009 7 19 /04 /avril /2009 16:42


C’est beau l’humanisme, c’est grand, c’est fort !
Au pays des idées c’est un soleil qui consume les ténèbres.
Mais, dans la « vraie vie », comme le dit une de mes connaissances, je peux constater que cette grande idée, ce grand soleil de la pensée, semble parfois tout juste bon à allumer les cigarettes de l’intellectualisme.

« Nous sommes tous frères », dans l’absolu c’est vrai, même si parfois cela aurait tendance à nous déranger quelque peu.
Mais, dans « la vraie vie », on a vite atteint la limite de la grande fratrie. En fait c’est comme si le moteur de nos pensées était nourri au carburant idéal qu’est l’humanisme, et que, curieusement, nos pensées, maigrichonnes et récalcitrantes, n’arrivaient pas à assimiler ce bel idéal.
Les écueils des confréries qui prônent un idéal de justice, d’amour et de compréhension, sont le plus souvent  l’étroitesse d’esprit, la médisance, l’intolérance et (ou) l’ambition des uns ou des autres. Pourquoi ?
Parce que toute confrérie a nécessité d’une structure pour fédérer le nombre et qu’une structure suppose une hiérarchie.
Il n’est pas évident,  dans le cadre de cette hiérarchie,  lorsque l’on aspire à  devenir
« pharaon » d’avoir les capacités de compréhension, de justice, de tolérance et d’amour indispensables au rôle tout en sachant réduire les guerres intestines qui sont inhérentes à toutes associations humaines.

Il est rare de naître sage, il est plus courant de le devenir, et ceux qui nous ont précédés sur ce chemin initiatique devraient être là pour nous guider tout en nous laissant libres. L’initiation n’est pas qu’un rite qui ferait de nous subitement des détenteurs de vérité ou de lumière, mais l’ouverture symbolique d’un chemin d’expérience personnelle qui fera peut-être de nous, un jour, des initiés.  Ensuite il faut veiller à rester sur le chemin car rien n’est définitivement acquis, et c’est sans doute cela qui fait l’intérêt de la vie.

La pratique du pouvoir peut pervertir le mieux intentionné des êtres, mais lorsque cet être se rapproche de l’idéal, il se doit de veiller de prime abord à débusquer en lui les ténèbres qui le guettent.
Lorsque naît la peur, de perdre une place hiérarchique dans une structure de perfectionnement de soi  (ou de ne pouvoir y accéder) ; lorsque le besoin de paraître ou de s’affirmer l’emporte sur la sagesse ; lorsque le pouvoir devient grisant au point de vouloir imposer sa voix et que la crainte de certains incite à les rejeter à priori ; il est bon alors de se poser la question de savoir si la place hiérarchique occupée correspond bien à notre degré de connaissance.
Pour la vraie sagesse, celle qui confère l’autorité, celle qui témoigne d’un certain détachement, le pouvoir n’est jamais qu’un attribut. Par contre l’ambition pour l’ambition, la volonté de réussite pour la réussite n’amènent qu’un pouvoir dénué de toute autorité, car, privé de sagesse, il s’impose sans être reconnu.

Si le chemin de l’initiation est long (toute une vie), il faut garder conscience que la chute ne demande que quelques secondes. Mais là encore il n’est rien d’irrémédiable, les chutes nous propulsent parfois à des seuils de compréhension qui se situent bien au-delà de ce que nous aurions pu espérer. D’un mal naît un bien, répondant en cela à la loi des transformations et de l’équilibre des forces de la nature selon la théorie du yin et du yang.
Une prière Ojiba au Grand Esprit dit ces mots : « aide-moi à combattre mon plus grand ennemi : moi-même ! »  ce qui équivaut au : « connais-toi toi-même ».
Il nous faut apprendre à cesser de craindre le regard des autres, à abandonner le désir d’apparaître parfait, apprendre à se regarder en face, dans l’entière nudité de notre vérité intérieure. Nul n’est jamais tout bon ou tout mauvais, nous avons tous des zones d’ombres, à chacun de les reconnaître pour mieux les combattre.
Montrer du doigt celles des autres, les parer de nos propres démons, n’est jamais qu’un constat d’impuissance envers nous-même, un mensonge qui nous éloigne du chemin.
On ne devrait avoir de meilleur juge que soi-même.

En ce qui me concerne, quelles que soient mes sympathies et quoi qu’il puisse paraître, je me situe en dehors de toute confrérie, en dehors de toute structure. J’essaie d’avancer dans la vie qui est la plus grande confrérie qui soit, avec vigilance et exigence. J’essaie de mesurer mes erreurs, de me remettre en selle lorsque les chaos de la vie me déstabilisent. Je me nourris d’expériences, de textes, de partages.  Et s'il m'est arrivé de carresser le désir de rejoindre une structure, en considérant les agissements de certains de ses membres, la petitesse parfois de leurs propos, leur manque d’amour apparent, j’ai définitivement opté pour mon indépendance.
Sans doute n’ai-je pas cette faculté de me couler dans un moule, d’en accepter les compromis et il semble donc qu’aucun moule ne me corresponde.
J’ai opté, pour un chemin sans dogme, sans rails auxquels m’accrocher, sans cocon dans lequel me rassurer, pour une avancée solitaire, avec la certitude de n’être déçue que par moi-même le cas échéant.
Cela ne m’interdit pas de prononcer une opinion, de reconnaître, soutenir ou de faire miennes les idées qui me semblent justes.
Et je ne m’interdis pas, de ma caverne, d’inviter ceux qui le souhaitent à la réflexion, en dehors de toute structure, simplement parce que du dialogue peuvent naître et vivre parfois d’intenses communions. AD


Image : l'accueil des ancêtres -huile sur toile Adamante-

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  • Comédienne, metteur en scène, diplômée en Qi Gong, j'écris, je peins.
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