La nuit est bleue, Grand père, du bleu de la pleine lune, dans un ciel sans nuage.
J’oublie les immeubles.
Sous le ciel c’est la forêt qui respire, les sources, l’herbe et le cœur de la terre qui rythment cette fête de l’esprit.
Dans cet océan nocturne, quelques stratus égarés glissent, comme des âmes pressées, vers un rendez-vous incertain.
Tout passe et disparaît. L’écran sombre est de nouveau vierge de toute présence.
La lune solitaire veille. Je la contemple.
Qui demain observera la nuit, derrière ce carreau qui me sépare d’elle, lorsque j’aurai à mon tour quitté le décor de la vie ?
Oui tout passe Grand père, et qui sait si la lune ne regarde pas ces milliards de petits hommes, qui naissent, se pressent et disparaissent, comme je le fais des nuages.
Ils traversent si rapidement la nuit que l’on pourrait se demander s’ils ont jamais existé ?
Pourtant il n’y a ce soir aucune place pour la tristesse, Grand Père.
Je m’imprègne de l’instant, de sa beauté, et je me dis que j’ai bien de la chance, à cette heure où tout le monde dort d’être là éveillée, à surprendre les secrets de l’ombre, les secrets révélés par l’éclat de la blancheur lunaire.
Mais cet éclat, c’est trop pour moi seule ce soir Grand père, il me faut le partager avec toi.
Que la nuit te soit douce Grand père, qu’elle soit favorable à ceux qui souffrent de ne pas te connaître.
©Adamante "lettres à Grand Père" dépôt SACD