Défi N° 27 de la RUCHE
Les sensations nous lient au temps, tout comme les sentiments, les manques et les désirs.
Voilà pourquoi j'ai choisi ce texte écrit il y a quelques années pour le défi de la Ruche. Adamante
Réchauffe-moi Grand père,
L’été est léger Grand père, les insectes font chanter la matinée et moi je cherche des impressions nouvelles.
Je ne veux pas parler du vent, du soleil, ni de mes états d’âme.
Je veux m’extraire de la sensation du temps qui passe, emportant avec lui ce qui nous est cher.
Je veux, comme un chercheur d’or, trouver le filon qui me mènera vers l’inconnu.
Je compte les taches de soleil sur le sol. Les ombres qui les entourent dansent doucement, mouvement hypnotique qui me pousse insensiblement vers le sommeil.
Qu’il serait doux de s’endormir.
J’ai envie de rêver, de laisser mon esprit vagabonder sans se fixer, flottant comme ces taches qui dansent là, devant moi.
Deux magnifiques destriers apparaissent, ils frémissent, se cabrent, je les entends hennir de toute la force de mon imaginaire. Me voici subjuguée par ce théâtre d’ombres dont je suis à la fois spectatrice et metteur en scène.
Une onde vivifiante me parcourt, j’exulte par toutes mes cellules ouvertes. Je me nourris de cette formidable énergie que m’offre ce jeu de la lumière.
J’en bois la force, mon corps est si las ces derniers temps. J’ai besoin de cet élixir de jeunesse.
L’image de feuilles de vigne vient apaiser la scène.
Une mélodie silencieuse s’égrène au rythme lent de leur balancement, c’est doux, c’est frais comme la sève. Je glisse insensiblement dans cette absence bienfaitrice, dans cet oubli du temps qui me fait m’oublier moi-même.
Je ne pense plus, je ne rêve plus, suis-je encore ?
Qu’importe, ce rien est un miracle, une île déserte habituellement masquée par les brumes de la pensée et des sentiments. Un malaise me ramène sur la rive des sensibilités, la douleur de l’absence vient de se réveiller et avec elle je subis la morsure de l’ombre.
Ipa me manque, mon amour n’a plus de forme où se poser.
J’étais si bien et me voilà si mal.
À quoi cela tient-il Grand père ? les taches de soleil ne me font plus rêver. Le jour, malgré sa joie stridulante et son éclat, n’arrive plus à me réchauffer. J’ai froid à l’intérieur.
Du Rien, il ne me reste rien, je me sens orpheline.
Où est donc le chemin qui me ramènera vers lui ? Je l’ai emprunté par hasard, mais je sais qu’à partir de cet instant, je le chercherai ce Rien, en conscience.
Puisse-tu m’aider Grand père, à le retrouver.
©Adamante
Dépôt SACD "Lettres à Grand Père"