Voicile petit texte que j'ai concocté, suivant les consignes d'Hélène
- 12 mots dans l'ordre (soulignés dans le texte)
pour le Jeu n° 2 des CROQUEURS DE MOTS
Avertissement :"toute
ressemblance avec des personnages réels ne serait que purement fortuite."
Elle en avait ras-le-bol, Mamie Louise, ras-la-casquette et le béret, d’écouter les incessantes récriminations de ses vieilles toupies de frangines, deux vieilles filles, qui lui pourrissaient la vie.
C’était monté, monté et un soir, elle avait craqué.
Elle avait décidé de passer à l’acte et de se barrer un temps. Elle avait rassemblé à la hâte quelques affaires et après un bref coup d’œil à la chambre, elle avait attrapé son sac à main et était partie en catimini pendant que les harpies, dans la cuisine, secrétaient leur venin en parlant de la voisine.
La nuit s’annonçait. Elle avançait d’un bon pas pour tenter de se calmer quand elle se trouva soudain face un Danois à la mine patibulaire qui la toisait d’un œil mauvais et semblait vouloir lui barrer la route.
Mamie Louise regarda autour d’elle, personne, la rue s’était vidée de ses passants avec l’arrivée du soir. Elle eut comme un vague regret, ils devaient être confortablement installés dans leurs fauteuils avec charentaises à regarder la télé.
Le clébard ne bougeait pas, mamie Louise ne pipait pas.
Une colonie d’ange eut le temps de passer et de repasser en battant des ailes dans leur dimension parallèle, sans doute plus accueillante que la rue avec ce monstre d’au moins cinquante kilos qui lui faisait face.
Soudain il se mit à secouer sa tête de gargouille avec ardeur, éclaboussant généreusement de sa bave une mamie Louise interdite.
Oubliant sa peur, elle se précipita vers la fontaine qui trônait sur la place, pour se débarrasser des viscosités, parfumées à l’haleine de chacal, qui lui soulevaient l’estomac.
Abandonnant sa valise un instant, elle offrit son visage à l’eau bienfaisante que crachait un angelot rigolard. Le clébard, pensant sans doute, mais qui pourrait le jurer, que c’était un jeu, sauta dans le bassin et se mit à faire des bonds en grondant d’un air ravi.
Mamie Louise, trempée, sentit alors un courant de révolte monter, comme une kundalini, le long de sa colonne vertébrale. C’en était trop ! Elle attrapa au vol sa valise et se mit à courir aussi vite que le lui permettaient ses talons aiguilles.
En courant elle pensait que si le molosse était aussi méchant qu’il en avait l’air, et qu’il se décidait à la poursuivre, il y avait de fortes chances pour qu’elle ait droit, vu la radinerie des vieilles, à un enterrement de 3ème classe quand on la retrouverait morte au petit matin, déchiquetée par ce cousin de Cerbère.
Mais le clébard avait abandonné, il était de toute évidence passé à autre chose.
Déprimée, Mamie Louise avançait maintenant en traînant sa valise, avec le désespoir de celle qui ne sait plus très bien ce qu’elle fait là, ni où elle va.
Une violente douleur lui vrillait la tête avec un bruit de scie insupportable.
Elle avisa alors un hôtel miteux et, comme un zombi, passa la porte pour demander une chambre.
Le bonhomme de la réception, un sale type suspicieux au nez bourgeonnant et aux cheveux filasse, lui demanda de régler d’avance.
Elle imaginait déjà la chambre et son grabat, et formula une prière pour qu’il n’y ait pas de punaises.
Mais, quand elle vit cette main sale aux doigts graisseux qui lui tendait la clef, elle crut que la terre allait s’ouvrir devant elle pour l’avaler.
Décidément, ce soir, la vie la lui jouait façon partition de musique contemporaine pour violons malades.
Alors elle attrapa la clef du bout des doigts et grimpa en toute hâte un escalier qui semblait n’avoir jamais connu la cire, en formulant l’espoir que la nuit soit courte. Fort heureusement, elle n’avait pas oublié de prendre ses somnifères.
©Adamante