Un grand merci aux participantes dont vous trouverez les liens sur les noms afin que vous puissiez leur rendre visite.
Voici une moisson formidable.
Encore merci.
AD
Le décès...
Le père a rendu l'âme,
Les pleureuses lui ferment les yeux
Le lavent, l'embaument
Le portent au linceul
Dans le lourd silence de la pièce
Puis égrènent leur chapelet,
Elles le veilleront jusqu'à l'aube...
La veuve et son clan
Sort le noir, paletots et voiles
Pour les femmes
Les brassards de deuil
Pour les hommes...
Le père a rendu l'âme,
Un mauvais coup de sabot d'cheval...
"Le visiteur du soir"
Le visiteur du soir a frappé à ma porte.
Tout encapuchonné, et, sous sa barbe noire
un sourire étonné.
Il m'a tendu la lanterne qu'il portait très haut...
"Tiens ! Tu dois me remplacer, car je n'ai plus la force !
- La force ?
Mais que dois-je faire ?"
Avais-je murmuré ou crié ?
Je ne sais.
La lumière vacillait et le visiteur avait disparu dans la brume qui montait.
J'ai mis la houppelande qu'il avait oubliée, caché un peu de mon visage dans une grande écharpe noire et je suis sortie dans la rue.
J'étais une ombre parmi d'autres, mais, très haut, le plus haut que je pouvais, je brandissais ce qu'il restait de lumière.
Il faisait froid, très froid...
Je me suis réveillée.
À la lanterne de son silence
Elle marche seule
Dans la nuit noire
De ses désespérances
Allumons la lumière
En perdition
Il tenait fort sa lampe
Dans son cauchemar il avait vu
Son petit ânon brun
Qui avait perdu sa maman
Il levait haut sa lampe
La nuit était très noire
Dans sa bouche
Dans sa voix
Toute la peur et l'inquiètude
Dans son cœur l'amour
Pour les faibles et les innocents
Pour ceux que l'on ignore
Pour les petits dans le malheur...
Une lueur dans la nuit...
A la nuit, à la nuit
Lorsque tout dort dans les chaumières
Que les chats grimpent aux gouttières
Poil hirsute, œil de chasseur.
A la nuit, à la nuit
Lorsque nos rêves se déguisent
Que les heures coulent sans courage
Masques blafards, hantises amères.
A la nuit, à la nuit
Spectre éploré cherche Dame Blanche
Lumière confuse à sa lanterne
Phantasme bleu, sourire granit.
A la nuit, à la nuit
Les mots se désagrègent
Sur les chemins abandonnés
Confettis hâves, fumet terreux...
Le gardien des morts
Nuit du 2 au 3 Novembre
Le Veilleur de nuit se mit à parcourir le labyrinthe des allées du Cimetière, balançant sa torche électrique au bout de son bras droit, en attendant l'heure de fermeture de
19 H.
En ce Jour de Commémoration des Morts, le Cimetière était devenu un immense Parc Floral !
Symboles de l'Eternité, les chrysanthèmes irradiaient de vie au cœur de la Mort...
Ces chrysanthèmes aux crinières de lion multicolores transformaient en chant immortel ces sépultures qui empêchaient la Nature d'avaler les corps...
Quelques familles déambulaient encore.
Les employés du Cimetière s'affairaient en poussant des brouettes remplies de feuilles mortes, de fleurs fanées et de détritus de toutes sortes laissés près des tombes par la Foule incivile... et reportaient les petits arrosoirs qui traînaient un peu partout...
Les oiseaux se sont tus à l'approche de la nuit...
Il était comme un Homme entre-parenthèses ! C'était lui le Gardien des Morts !
Sans lui, le Cimetière serait vite devenu un repaire de chenapans, ces ombres furtives sans Foi ni Loi qui semblaient avoir perdu le sens de leur voyage terrestre...
Il savait qu'il était comme la Mémoire Vivante de tous ces défunts, démuni souvent, seul, armé que de son seul courage.
Il aimait les monuments prétentieux au décor suranné comme la beauté des tombes toutes simples, les laides plaques du souvenirs et même les dérisoires fleurs plastiques qui se fanaient sans avoir vécues : témoignages s'élevant comme des barrages à l'oubli ... façon pour l'Homme d'assumer son Humanité ?
Cet endroit sacré plein d'ombres le fascinait...
Il alluma sa lampe torche. Le Cimetière, vidé de la Foule et des employés, avait retrouvé sa part d'Inconnu et de Silence.
Il progressait pas à pas au milieu des tombes, creusant la nuit de la lumière de sa lampe, dans une méditation lente et prudente.
La morsure des années lui avait fait perdre toutes ses illusions, et il comprenait toutes les misères et les mensonges de ce monde impitoyable que seul protégeait le Repos pour ces âmes fatiguées, dans le rempart de leur tombeau !
Ceux qui sont passés sur l'Autre Rive sont ils plus Vivants que les Humains ?
Les yeux fermés de dessous la tombe s'ouvraient ils, émerveillés, à un Monde de Miséricorde....
Où bien étaient ils définitivement clos sur eux-mêmes ?
Il tentait bien quelquefois d'interroger les Morts...
Puis se gendarmait, confus ! Était-il fou de vouloir ainsi creuser le Vide qui déclenchait des impatiences nocives à la vie ?
Pourtant, il lui semblait que des liens indicibles l'unissaient à ce monde souterrain dont il se sentait à la fois l'humble protecteur et ... le captif...
Sa lampe torche fouillait l'obscurité, surveillant les alentours, jusqu'à la pointe du jour...
Ilelle
Les rues sont vides
Barbe noire
Il déambule
À moins qu’il ne soit
Elle
Voilée…
Hotte factice
Estomac creux
L’esprit en berne
Une vie au goût aigre
Un soir de mauvais vin
Un père Noël
Déçu du monde
Un chômeur peut-être
Un paumé
Il
Elle
Qu’importe
Ilelle Ilelle Ilelle
Danse des pieds
Au rythme d’un rien
Ilelle Ilelle Ilelle
Comme un chant d’oiseau
Sur l’écho d’un trottoir
Ilelle Ilelle Ilelle
Toi ?
Moi ?
On a tous sa chute
Un jour
Apprentissage
Alors chantons
Ilelle Ilelle Ilelle
Alors dansons
Ilelle Ilelle Ilelle
Rythme des pieds
Sur le trottoir.
De la terre en fusion, je suis sortie.
roulée par le vent, façonnées par la pluie
sur un bord de route, j'étais en attente.
Quelques méchants coups, d'éclats enlevés
modifièrent ma forme primitive.
Un artiste est passé... et me voici transformée
... et toute grimée.
Et encore :
Toute grimée..
le regard s'habitue et me voici
dans une imagination débordante, transformée
en un couple venant d'ailleurs.
La petite, en femme grillagée
marchant derrière son imam barbu...
Bruit de sabots sur la route.
Dans ma chaumière j'écoute.
Mais qui donc passe par là
Tandis qu'approche le pas ?
Il fait nuit et il fait froid,
Un temps à rester chez soi.
Qui peut aller sur la route ?
En moi se glisse le doute ...
J'ouvre ma porte en silence,
Je regarde avec méfiance
Cet homme sous capuchon
Qui ne me dit rien de bon ...
Bientôt la nuit de Samain
L'univers est incertain.
Ciel ! Quel étrange visage
Comme un funeste présage !
L'homme brandit sa lanterne,
Vision vraie ou baliverne :
N'est-ce point face de loup
Qui se profile dessous ?
L'homme donne de la voix
Et tout s'éclaire, ma foi :
Le sacristain du village
Loup garou ? Je déménage !
C'est à lui que j'ai affaire,
Un bonhomme débonnaire
Juste un effet du halo
Et sa barbe noir corbeau !
Il se réchauffe en marchant,
Rentré tard et attendant
Que le feu prenne en son âtre,
Des bûches, il en a mis quatre.
Entrez donc en ma demeure,
Vous prendrez bien à cette heure
Un bol de ma soupe au chou
Avant de rentrer chez vous !
Lenaïg